Lucio, la vengeance dans la peau

Pour beaucoup, il est l’archétype du défenseur brésilien. Une technique au-dessus de la moyenne, des montées rageuses, des buts, mais aussi des boulettes qui coûtent parfois cher à son équipe. Pourtant, l’expérience faisant son œuvre, Lucio s’est assagi. Le longiligne défenseur auriverde (1,88m, 84 kgs), débarqué à Milan en début de saison, s’est rapidement imposé comme le taulier de l’équipe entraînée par José Mourinho. Samedi soir, il défiera avec l’Inter son ancien club du Bayern Munich en finale de la Ligue des champions. Une belle histoire en perspective ?

Lucio1Comme un parfum de revanche dans l’air ? Même s’il nie toute velléité de vengeance, et assure ne garder que de bons souvenirs de son passage en Bavière, les retrouvailles avec le Bayern auront un goût particulier pour Lucimar Ferreira da Silva, aka Lucio.
Flashback. Après cinq années de bons et loyaux services disputées sous les couleurs munichoises, l’international brésilien se voit gentiment montré la porte de sortie. Les raisons de ce divorce ? Lui réclame un contrat longue durée, que la direction du club ne semble pas disposée à lui offrir, et le nouvel entraîneur, un certain Louis Van Gaal, ne l’inclut pas forcément dans ses plans. Vexé, Lucio laisse exploser son courroux dans les colonnes de Kicker : « Chaque entraîneur a son opinion, c’est normal. Mais dans cette séparation, on m’a manqué de respect. Je pense pourtant que j’en méritais un peu plus. J’aurais préféré que l’entraîneur me parle d’abord à moi, avant de prendre sa décision. Je suis champion du monde, j’ai gagné deux coupes des Confédérations et j’ai été désigné meilleur défenseur de la Bundesliga. Je n’avais quand même pas à lui apporter encore plus de preuves de mes qualités ». Piqué au vif, il ne met pas longtemps à accepter l’offre de l’Inter Milan, qui lui propose trois ans de contrat et un salaire de 4,5 millions d’euros annuels. Le folle aventure italienne débute alors pour Lucio…

Défenseur avec un grand D

Lucio4Le public du Vieux Continent se souvient de découvrir Lucio et ses grands compas en 2002, lors de la fabuleuse épopée du Bayer Leverkusen en Ligue des champions. A cette époque, le défenseur arrivé en provenance de l’Internacional de Porto Alegre un an plus tôt, impressionne par son engagement sans faille, ses dribbles borderline et ses chevauchées victorieuses. Si une volée magique de Zizou anéantit ses rêves européens, le bonhomme se venge l’été suivant en remportant la Coupe du monde en Asie avec le Brésil, où il est un titulaire indiscutable à tout juste 24 ans. De quoi taper dans l’œil d‘écuries plus prestigieuses, et c’est finalement le Bayern qui emporte la mise. Malgré cinq saisons couronnées de succès, avec trois doublés coupe-championnat à la clé (2005, 2006,2008), l’histoire se termine en eau de boudin.
Lucio choisit alors l’Inter pour donner un nouvel élan à sa carrière. Un pari audacieux, mais pour l’instant complètement réussi. Intégré à vitesse grand V au sein du collectif lombard, il forme avec son compère Walter Samuel un duo intimidant, rigoureux et totalement hermétique, qui a porté l’Inter vers son cinquième Scudetto consécutif (meilleure défense de Serie A avec 34 buts encaissés). Lucio apparaît être la pièce qui manquait aux nerazzurri pour voir plus loin sur la scène continentale. Ses prestations de mammouth dans la plus prestigieuse des compétitions ne sont d’ailleurs peut-être pas si étrangères au parcours exceptionnel des Milanais. Héroïque face à Chelsea en quarts et face au Barça en demies, ces performances lui ont valu les éloges de son président Massimo Moratti. Celui-ci a notamment encensé son joueur après la victoire face aux Blues à San Siro : « Lucio a été incroyable et très courageux, il n’a rien fait de mauvais. Il a joué comme deux personnes ».

Mourinho et Dieu

Lucio2Sous la houlette de José Mourinho, le grand Lucio semble avoir atteint l’âge de maturité. Sa rigueur, son remarquable jeu de tête et ses interventions chirurgicales dans les pieds adverses ont fini de balayer les idées reçues, et de l’entériner comme un « brésilien qui sait défendre ». La patte et les méthodes du « Special One » ont d’ailleurs beaucoup joué dans son épanouissement, si l’on en croit les propos du principal intéressé : « Mourinho a assurément transmis son calme et une grande motivation aux joueurs, et ça a été vraiment déterminant. Les gens nous font croire en nos rêves, avoir confiance en notre équipe, et ça fait une différence tangible chaque jour de compétition. C’est réellement important, le fait que le coach transmette sa confiance à ses joueurs ».
Outre l’influence du Mou, l’autre secret de la réussite de Lucio réside dans sa dévotion à Dieu. A l’instar de son compatriote Kaka et de nombreux autres auriverdes, le capitaine de la Seleçäo (89 sélections) fait partie du groupe des chrétiens évangéliques. Avant les matches de la sélection nationale, il est celui qui organise les fameuses prières au centre du terrain. Une foi absolue et une spiritualité qui l’ont toujours accompagné dans sa vie et dans sa carrière de footballeur : « Je pense qu’il est nécessaire d’adopter un esprit de respect et d’amitié, pas seulement sur le terrain mais à travers ma discipline quotidienne : j’ai une famille stable, une femme et des enfants, et cette stabilité m’accompagne sur le terrain. Ca me donne davantage de sérénité et un bon équilibre. Cela veut dire que je peux travailler et m’entraîner correctement tous les jours. Ca m’aide beaucoup. Et quand vous êtes au travail, que vous soyez footballeur ou non, vous devez toujours croire que le meilleur peut vous arriver, vous devez toujours garder espoir. C’est aussi ce qui a fait la différence dans notre équipe ».

Samedi soir, sur la pelouse de Santiago Bernabeu, Lucio et ses condisciples intéristes viseront un sensationnel triplé. Olic et compagnie seraient eux bien inspirés de brûler quelques cierges, en priant pour que la grande tige brésilienne ne leur fasse pas passer une soirée cauchemardesque…

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