Svechnikov, la nouvelle tsar !

SvechnikovIl est l’une des grandes attractions de la NHL nouvelle génération. A 19 ans, Andrei Shvechnikov construit déjà sa renommée et présente toutes les caractéristiques d’un joueur capable de marquer son époque. Portrait d’un surdoué qui n’a pas froid aux yeux.

C’est l’histoire d’un jeune homme qui aime faire tout plus vite que les autres. Fin 2019, deux éclairs lui ont suffi pour changer de statut. Deux coups de folie, prouesses ou tours de magie, appelez-les comme vous voudrez, qui sont instantanément entrés dans l’histoire. Les images ont fait le tour de la planète hockey et ont propulsé Andrei Shvechnikov au rang de personnalité incontournable de son sport. La preuve ? Pour la rédaction de Slapshot, lui consacrer un article dans son nouveau numéro sonnait tout simplement comme une évidence !

Marque déposée

Petit rappel des faits pour ceux qui auraient hiberné ces derniers mois. Nous sommes le 29 octobre et Carolina reçoit Calgary lors d’un match de saison régulière parti pour sombrer vers l’anecdotique, comme tant d’autres. Ce, jusqu’à la moitié du troisième tiers, moment choisi par Andrei Shvechnikov pour figer le temps. Alors que son équipe est menée 1-0, le jeune Russe fond dans la zone offensive sur la gauche et va travailler derrière la cage de David Rittich. Il scotche alors le palet sur le bout de sa crosse, qu’il soulève, revient au premier poteau et le glisse dans la lucarne du gardien des Flames, médusé. Le public de Raleigh exulte et célèbre une grande première dans l’histoire de la NHL.

Ce mouvement était jusqu’alors plus connu sous le nom de « Michigan ». Eric Legg l’avait emprunté à un certain Billy Armstrong avant de le populariser à l’occasion d’un tournoi NCAA en 1996. Sidney Crosby, dans les rangs juniors, ou Mikael Granlund, lors des championnats du monde 2011, étaient parvenus à le reproduire en compétition. Mais jamais l’exploit n’avait pu être réédité dans la grande Ligue. Andrei Shvechnikov s’en est chargé et, quitte à marquer les esprits, il a dupliqué son chef d’œuvre le 17 décembre contre les Jets de Winnipeg. Au cas où certains auraient pu penser à une simple intervention de dame chance.

Nous sommes ici en présence de bien plus que de simples « highlights ». Comment évaluer leur impact ? En allant peut-être sur la chaîne Youtube de la NHL, où les vidéos des buts cumulent déjà 450 000 vues. Ou en jouant les petites souris à un entraînement des jeunes de Carolina, qui n’ont plus qu’une idée en tête, imiter leur nouvelle idole. Voire en regardant du côté des pros pour qui réussir une « Svech », nouvelle marque déposée, est devenu un objectif. Filip Forsberg (Nashville Predators) et Nils Hoglander (Suède, championnats du monde juniors) l’ont déjà réalisée, depuis. Inspirant, vous avez dit ?


« 82 matches, ce n’est pas assez pour lui ! »

On aurait toutefois tort de cantonner Andrei Svechnikov à ce geste technique. Le prodige originaire de Barnaoul, en Sibérie, suit en effet une trajectoire qui ne doit rien au hasard. Stimulé depuis son plus jeune âge par son grand frère Evgeny – qui évolue actuellement dans l’organisation des Detroit Red Wings –, il a démontré une précocité monstre à toutes les étapes de sa carrière jusqu’à présent. Rookie de l’année dès ses débuts en USHL, il reçoit les mêmes honneurs l’année suivante en OHL, du jamais-vu. Il est repêché au 2e rang par Carolina lors de la Draft 2018 et ne met pas longtemps à prendre ses marques. Son premier exercice est encourageant avec 20 buts (37 points à la clé). Cette saison, il passe clairement la vitesse supérieure. Associé à Sebastian Aho et Teuvo Teravainen en première ligne, l’ailier droit affiche un bilan de 53 points (23 + 30) en 57 matches au 15 février.

Cette réussite est tout sauf surprenante pour un garçon possédant la panoplie complète du hockeyeur moderne. A la fois rapide et fluide, physique et agressif, créatif et précis, il a en outre ce petit plus qui fait toute la différence au plus haut niveau : une éthique de travail supérieure à la moyenne. Ceux qui le côtoient sont unanimes sur ce point. Morceaux choisis. « Il y a ce terrain d’entraînement où l’équipe finit parfois à midi. Quand je passe à 15 heures, il m’arrive de voir Andrei, encore là, enchaîner les tirs », déclare Don Waddell, le GM des Canes. « Souvent, il s’entraîne encore quand je m’apprête à quitter le complexe et je suis obligé de lui dire : « Mais bon sang, rentre chez toi ! », ajoute son coach, Rod Brind’Amour. Enfin, son agent Todd Diamond ajoute qu’il pourrait « jouer 12 mois dans l’année. 82 matches, ce n’est pas assez pour lui ! »

Déterminé, voire obnubilé, Andrei, qui a commencé le patin à 2 ans, dévoile une force de caractère et une persévérance assez stupéfiantes. Ses deux coups d’éclat sont dus, certes, à une part de talent, mais sans doute encore plus à des heures et des heures d’entraînement. Il sait exactement où il veut aller, et ce « où » se situe dans une catégorie bien à part : celles des champions d’exception. « Tu peux voir dans ses yeux qu’il veut devenir une superstar de la NHL, confirme d’ailleurs son coéquipier Jordan Staal. Et il fait le nécessaire pour y parvenir.

« Act like a star and be a star »

Issu d’un milieu extrêmement modeste, Andrei Svechnikov a néanmoins pu bénéficier du soutien inconditionnel de sa famille. Ses parents n’ont jamais hésité à déménager pour accompagner et épauler leurs enfants. Suivant la trace de son aîné, il a ainsi pu découvrir relativement tôt l’Amérique du Nord, son jeu, sa culture, son langage. Un avantage dont il a su tirer profit pour faciliter son adaptation dans la cour des grands.

Personnage sémillant, sa bonne humeur et son sens de l’humour sont appréciés au sein du collectif de Carolina. Lorsqu’il délaisse son costume de prestidigitateur sur glace, il n’en perd pas pour autant son sens de spectacle. Il s’est notamment mis à la magie et régale ses coéquipiers de quelques tours de passe-passe lors des déplacements. Complètement décomplexé, il élude la pression inhérente au très haut niveau de manière déconcertante. L’anecdote vaut le détour. Au printemps dernier, lors des playoffs, il avait jeté les gants avec Alex Ovechkin avant d’être mis brutalement ko par son glorieux compatriote. Interviewé quelques semaines plus tard sur un tout autre sujet, la boxe, il déclarait sur un ton désopilant que le meilleur sportif de la discipline, selon lui, n’était autre que… le numéro 8 des Capitals !

« Act like a star and be a star ». En une phrase, Dougie Hamilton est celui qui résume peut-être le mieux le personnage. Incroyablement doué et travailleur, Andrei Svechnikov, est aussi, et surtout, plus que ça : un gamin dont le profil nous évoque tout simplement celui d’un joueur générationnel.

Article paru dans le n°100 de Slapshot Mag

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