Sherman, un prédateur dans l’arène

Richard Sherman est actuellement le meilleur CB en NFL. (Kcconfidential.com)

Richard Sherman est actuellement le meilleur CB en NFL. (Kcconfidential.com)

Ses incessantes provocations feraient presque de l’ombre à ses coups d’éclat sur le terrain. Agitateur à la langue bien pendue, Richard Sherman n’en reste pas moins l’un des meilleurs joueurs de la planète NFL. Adulé ou détesté, le cornerback des Seahawks ne laisse pas insensible et a donné le ton du Superbowl XLVIII qui mettra aux prises Seattle à Denver, le 2 février, au MetLife Stadium d’East Rutherford.

« Je suis le meilleur corner du jeu. Voici le résultat quand vous m’attaquez avec un receveur aussi médiocre que Crabtree. Ne parle plus jamais de moi ! » Impossible d’être passé à côté de l’improbable sortie de Richard Sherman à l’issue de la victoire des Seahawks face à San Francisco en finale de la conférence NFC (23-17). Dans un état second, le leader de la défense de Seattle s’est présenté devant les caméras de la Fox, au micro d’une Erin Andrews médusée, pour invectiver ses victimes du soir et en particulier le receveur des 49ers, Michael Crabtree, qui avait commis l’erreur de flatter son ego avant le coup d’envoi.

Il n’a fallu que quelques minutes pour voir la sphère médiatique et les réseaux sociaux s’embraser. Arrogant et manquant cruellement de classe pour les uns, passionné et génial entertainer pour les autres, Sherman s’est retrouvé propulsé au cœur de toutes les discussions outre-Atlantique. En l’espace d’une action – la passe déviée de Colin Kaepernick récupérée par Malcolm Smith pour sceller le sort de SF – et de son interview d’après-match, le phénomène n’a pourtant fait que remettre au jour deux évidences. Qu’il est bien la référence absolue à son poste en plus d’être le roi des trash-talkers.

« Je voulais être comme Mohamed Ali »

Il faut dire que le numéro 25 n’en est pas à sa première incartade et prend un malin plaisir à défrayer la chronique depuis son arrivée dans la Ligue en 2011. Ses chamailleries répétées avec Tom Brady, Darrelle Revis, Trent Williams, Rodney White ou le journaliste Skip Bayless sont des morceaux de choix et l’ont rapidement catalogué comme l’agitateur de service. Toujours prêt à se lancer dans une joute verbale, Richard Sherman incarne la figure du provocateur né, un trait de caractère qui a toujours jalonné son parcours.

Ayant grandi dans un quartier difficile de Los Angeles, Sherman s’est évertué à repousser les limites pour atteindre ses objectifs. Tout en développant rapidement une fascination pour un certain Mohamed Ali. « Ali savait comment manipuler le monde, confiait-il dans les colonnes de Sports Illustrated. Quand il disait : « le champion est là », je ne crois pas qu’il était suffisant. Il avait créé un personnage. C’était un leader et un showman, il savait comment faire craquer les gens sur le ring. Je ne m’intéressais pas vraiment à la boxe, mais je voulais être comme Ali. »

Suivant l’exemple de « The Greatest », le gamin de Compton va ainsi tout mettre en œuvre pour se faire une place au soleil. Guidés par des parents soucieux de son éducation et de son avenir – son père, Kevin, chauffeur de camion poubelle, l’éloignant de la voie des gangs pendant que sa mère, Beverly, s’efforçait de le motiver en lui offrant 5 dollars pour chaque « A » ramené de l’école -, il s’accroche. En 2010, il obtient un diplôme de communication de la prestigieuse université de Stanford avant de faire le saut dans la cour des grands.

Un érudit du jeu

Wide receiver reconverti cornerback – après avoir connu des relations houleuses avec Jim Harbaugh, l’actuel head coach des 49ers -, Sherman est finalement sélectionné très tardivement lors de la draft, au 154e rang (5e tour). A ce moment, les Seahawks ne savent pas encore qu’en choisissant celui qui jure être capable de nommer tous les arrières défensifs repêchés ce jour-là avant lui, ils viennent de réaliser une affaire en or massif. L’adaptation à la NFL est instantanée. Se reposant sur une lecture du jeu au-dessus de la moyenne, le Californien (1,91m, 88 kg) parvient à asphyxier ses adversaires directs tout en injectant une dimension physique unique à sa palette.

Son secret ? Au-delà d’être un athlète de premier plan, ce véritable érudit opte pour une approche cérébrale du jeu. Doté d’une étonnante mémoire visuelle – lui qui est capable de réciter les 18 chiffres de son code Wi-Fi -, Sherman, avant un match, visionne attentivement les 12 dernières rencontres de ses adversaires, prend des notes, dissèque les schémas, les positionnements, les appels des quarterbacks, les courses des receveurs. Avec, dans l’idée, de décrypter tous les codes et d’avoir toujours un coup d’avance en situation.

Hate him or love him…

Les performances du cornerback vedette sont évidemment loin d’être étrangères au succès rencontré par Seattle actuellement. Fer de lance de la « Legion of boom », une défense qui terrorise la NFL entière depuis maintenant deux ans, l’homme aux dreadlocks se mue en coupeur de gorges dès lors qu’il est propulsé dans l’arène. Et se pose comme l’un des meilleurs spécimens au poste que ce sport ait connu dans son histoire.

Dans un pays où les golden boys ont toujours bonne presse et les faveurs des foules, sa réussite et son style agacent. Il reste que le football américain est un show à nul autre pareil et ne peut se passer de personnages de cette trempe. Un Richard Sherman qui échappe d’ailleurs, par bien des aspects, à la caricature que l’on veut bien dresser de lui. Son duel à distance avec Peyton Manning promet déjà d’être l’une des principales attractions du Superbowl à venir. Manning, l’homme de tous les records, qui aura toutes les raisons de se méfier s’il daigne s’aventurer à la passe dans le territoire défendu par le prédateur

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